samedi 31 janvier 2009

Le déclin de l'empire

Je suis tombée hier sur ce reportage d'envoyé spécial sur une de mes séries préférées "The Wire".

http://www.dailymotion.com/playlist/x4cj1_liteon77_autres/video/x1vwy3_the-wire-saison-5-envoye-special_creation


Le créateur y parle à un moment donné du déclin de l'empire américain et cela m'a fait pensé à... Denys Arcand et à sa trilogie:

Le déclin de l'Empire Américain (ou quand les hommes sont dans la cuisine et les femmes dans les salles de sport !) - 1986
http://www.youtube.com/watch?v=x8XbDQkpQr0&feature=related


Les Invasions barbares (avec les mêmes huit acteurs principaux) - 2003
http://www.youtube.com/watch?v=ZCwcdYFpiV4&feature=related

( j'aime bien cette scène, c'est très réaliste: http://www.youtube.com/watch?v=eqXmM91PleY&feature=related )

L'Âge des Ténèbres - 2007
http://www.youtube.com/watch?v=wOKcNmuR9mo


Hum... on se demande alors avec curiosité ce que nous réserve l'avenir, je veux dire dans 25 ans.

Un Forum de Davos... pas comme les autres

Le Forum de Davos, habituellement considéré comme un rassemblement des puissants de ce monde (il s'agit de puissance économique bien entendu) pour permettre un networking d'une intensité unique, est cette année plombé par la crise. Deux fois plus de chefs d'État par rapport à l'année prochaine seront sur place et vont vouloir expressemment interagir avec les chefs d'entreprise et de banques.

Voici une série d'articles et de reportages là-dessus par l'équipe de France 24:

http://www.france24.com/fr/category/tags-thematiques/davos


Le premier article là-dessus:

Un Forum de Davos sur la piste de l'après-crise

Lundi 26 janvier 2009


Politiques et directeurs de Banques centrales devraient éclipser les chefs d'entreprises au cours de cette 39e édition du Forum économique mondial de Davos, qui se donne pour ambition de "forger le monde de l'après-crise".


Sans surprise, les débats du Forum économique de Davos, qui s’ouvre mercredi dans cette station de ski de la Suisse alémanique, seront consacrés aux moyens de relancer une économie mondiale en crise. Contexte international oblige, réceptions, cocktails et autres réjouissances qui accompagnent habituellement ce Forum - géré par une organisation privée - seront toutefois moins fastueux qu’à l’accoutumée.

Les dirigeants politiques et les patrons des Banques centrales devraient, cette année, éclipser les chefs d'entreprises. La démission du gouvernement islandais, deux jours avant l’ouverture du Forum, n’a fait qu’adresser un signe supplémentaire d’inquiétude à la classe politique internationale.

Plus de 40 chefs d’Etat et de gouvernement - soit près de deux fois plus qu’en 2008 - ainsi qu’une quarantaine de ministres des Finances et de représentants de Banques centrales sont ainsi attendus. Le gotha de l’entreprise est pour sa part représenté par près de 1 400 personnes, mais on note la participation d’un nombre moins important de grands capitaines de banques et d’industries.

Le Premier ministre russe, Vladimir Poutine, doit donner le coup d'envoi de ces cinq jours de discussions qui ont pour mot d'ordre : "Forger le monde de l'après-crise." La chancelière allemande Angela Merkel, le Premier ministre japonais Taro Aso et son homologue britannique Gordon Brown seront également présents. Seule absence notable : celle de la nouvelle équipe du président américain Barack Obama, qui n’envoie qu’une mince délégation. M. Obama sera représenté par sa conseillère Valerie Jarrett.

"Ces gens sont des récidivistes en banalités"

Symbole du capitalisme flamboyant, le Forum se rêve en pompier de l’économie mondiale. Cette ambition fait sourire de nombreux experts, pour qui Davos n’a, d’une part, aucune légitimité politique et, d’autre part, aucune volonté de rompre avec l’idéologie dominante. Personne ne s’attend, par exemple, à un quelconque mea culpa sur le système éonomique mondial.

"Davos est un salon de vanités, rien de plus, estime ainsi Markus Kerber, professeur d’économie politique au Technische Universität de Berlin, dans une interview à FRANCE 24. La remise à plat que l’on devrait attendre d’un tel forum n’aura pas lieu. Davos n’a jamais apporté ni solutions ni d’approches nouvelles. Ces gens sont des récidivistes en banalités. Ils ne remettent rien en question, surtout pas la politique du FMI ni celle des banques mondiales."

Davantage que les débats et tables rondes (200 rendez-vous sont programmés durant les cinq jours du forum), ce sont les coulisses qui importent. "Davos n’est pas un endroit où se prennent des décisions, explique à FRANCE 24 Nicolas Bouzou, économiste et directeur du cabinet Asterès. C’est un espace au sein duquel les dirigeants se disent des choses qu’ils ne se diraient pas ailleurs. Il y a peu d’occasions comme celles-ci, où tous les grands acteurs du monde économique et politique peuvent bénéficier de rencontres privilégiées. C’est ce que le G7 était au départ, dans les années 1970."

"Faire barrage au protectionnisme"

Directeur de la Recherche et des Etudes économiques de Natixis, Patrick Artus estime que l’enjeu de cette 39e édition est le protectionnisme. "A Davos, les économistes doivent faire pression sur les décideurs politiques pour qu’ils ne s’engagent pas trop sur la voie du protectionnisme concernant leurs économies respectives. Tout le monde parle de la crise de 1929, alors que l’on se souvient que le protectionnisme et la politique monétaire restrictive imposés par la suite par les Etats-Unis n’ont pu régler le problème."

Selon Nicolas Bouzou, "la problématique va porter sur les moyens de relancer l’économie réelle à court terme - une relance qui sera d’autant plus efficace qu’elle est coordonnée. Dans un second temps, va se poser la question de la régulation financière - et savoir surtout quelle instance doit s'en charger - afin que cette crise mondiale ne se reproduise pas dans quelques années".

Cette année, l’atmosphère du Forum devrait être plus morose que d'habitude : "Tous ces grands gourous devraient quand même parler avec une certaine modestie, ajoute Markus Kerber. Ce qui se passe est une crise financière sans précédent que ni les économistes ni les hommes politiques n’avaient ni prévu ni quantifié."

En parallèle aux discussions de Davos, le Forum social mondial doit se tenir à Belém, au Brésil, du 27 janvier au 1er février. Chez les altermondialistes, la critique du système économique mondial devrait cette fois concentrer la majorité des débats.

mercredi 28 janvier 2009

Une interview avec le Professeur Geoges Box

Voici une interview du Professeur George Box qui provient du newsletter du International Statistical Institute (ISI):

http://isi.cbs.nl/NLet/NLet081.htm#08HonoraryMemberInterviews


Habituellement en sciences humaines, nous utilisons les outils créés par ces chercheurs et qui portent leurs noms comme si c'était tout naturel qu'ils soient à notre portée. Et nous faisons nos travaux d'école, nos tests en laboratoire informatique, puis souvent après l'installation d'un logiciel, un clic suffit pour faire travailler notre ordinateur et sortir nos résultats... Grâce à qui ?

Ce qui m'a le plus frappé en lisant cet échange, c'est la relation qu'il a faite entre l'expérimentation scientifique et l'analyse statistique. Si mes cours d'économétrie au premier cycle universitaire avait été donnés en partant de l'expérimentation scientifique, à mon avis je me serai intéressée à cette matière beaucoup plus tôt et beaucoup plus facilement !

Fatou, Amina... et Olivier Miller

Il s'appelle Olivier Miller, il parle de Génération Virtuelle dans sa chanson et d'après le billet 25 janvier, Fatou et Amina semblent bien d'accord avec lui !

http://www.youtube.com/watch?v=yjleSErxtes

Paroles

Elle n’a pas connu de période d’après guerre
Où parait-il le bonheur est moins chère
Ma génération
N’a pas connu d’éco en évolution
Pas de baby boom, pas de Bob Marley,
Pas de Léon Blum, ni de Marvin Gaye
Née après 70
Pas née au moment propice
Voilà dans quoi nous avons débarqué
Pas vraiment compris
Nous sommes en quête d’identité

Dites, bonjour à ma génération
Née sur l’île de la tentation
Faites place
A la nouvelle
Notre belle
Génération virtuelle

Elle avait hâte de l’an 2000 pour les skate-boards volants
Elle a eu Internet, le téléchargement
Fils de pub
Nous sommes victimes de l’esthétisme
Un max de communication
Pour l’ère de l’individualisme
Pas de Malcom X, non
Pas de Warhol,
Pas de sexe sans risque
Non pas de bol !

Née après 70
Pas née au moment propice
Voilà dans quoi nous avons débarqué
Pas vraiment compris
Nous sommes en quête d’identité

Dites bonjour à ma génération
Née sur l’île de la tentation
Faites place
A la nouvelle
Notre belle
Génération virtuelle

Allez danse jeune France,
Et rejoins-moi sur la piste
Y a les batteurs, les guitaristes
Les bassistes et les saxophonistes
Un plateau rempli d’artistes
Avec breakers et danseurs de twist
Hippies et activistes
Bourgeois-bohèmes et arrivistes
Modestes, utopistes
Et pauvres réalistes
Mais y’a toute une génération sur ma liste
En manque de folie
En manque d’action
Messieurs faites quelque chose pour ma génération

Bonjour à ma génération
Née sur l’île de la tentation
Faites place
A la nouvelle
Notre belle
Génération virtuelle

lundi 26 janvier 2009

- On rentre à Dakar Ndack ? - Oui... mais on va habiter où ?


DAKAR DANS UNE SPIRALE INFLATIONNNISTE

Le secteur s’avère particulièrement dynamique. La spirale inflationniste aussi.

Par Amadou Fall, Dakar

Soutenue par un taux de croissance à deux chiffres tournant autour de 15% et portant sa part dans la formation du PIB à 5,4% en 2007, la branche Bâtiment et Travaux publics est le segment le plus dynamique du secteur secondaire sénégalais. Il est nettement plus performant que le sous-secteur industriel, fortement handicapé par la flambée des cours pétroliers et les difficultés que traversent trois parmi les plus grosses entreprises du pays : les Industries chimiques, la Société de raffinage et la Société nationale d’électricité. Le chiffre d’affaires du BTP a crû de 17,7% de 2006 à 2007, contre 9,6% pour le sous-secteur industriel, comme relevé dans la note de conjoncture rendue publique en décembre 2007 par le Ministère de l’économie et des finances du Sénégal.
Le BTP est, en très grande partie, redevable de son expansion aux grands chantiers qui s’exécutent dans le domaine des infrastructures routières, mais également aux investissements croissants dans l’immobilier. Selon les résultats d’une enquête à l’initiative de la Fédération sénégalaise des sociétés d’assurances, plus de 46 milliards de FCFA (70 millions d’euros) y sont investis, chaque année, à Dakar principalement.

Frénésie constructive
Concentrant 80% des industries, 75% des autres activités économiques et administratives, 30% de la population du pays et l’essentiel des étrangers qui y vivent ou séjournent, la capitale sénégalaise est prise dans une incroyable frénésie constructive. La demande exponentielle en locaux à usage industriel, commercial, administratif ou domestique, résultant de cette très forte concentration économique et humaine, est en train de transformer le paysage urbain dakarois. Du quartier des affaires communément appelé Plateau jusqu’aux banlieues les plus reculées, les chantiers se multiplient d’où émergent, comme des champignons, des bâtiments flambant neufs mais à qualité variable. Il faut noter que le secteur compte quelque 20 000 entrepreneurs informels, dont certains, pour ne pas dire la plupart, travaillent hors normes…
Dans un contexte où nombre de secteurs d’activité sont en crise, saturés ou très aléatoirement rentables, le foncier et l’immobilier s’offrent de plus en plus à Dakar comme des « valeur-refuges » et des « valeurs sûres », qui répondent à une demande incompressible comparée à d’autres. L’on y investit parce que le créneau est d’un rapport immédiat confortable et constitue une rente qui gagne en valeur, avec le temps, pour la famille. Surtout que dans la capitale sénégalaise, très à l’étroit dans ses limites naturelles et qui n’a désormais plus de réserves foncières, la demande immobilière restera toujours plus forte que l’offre.

Augmentation constante
Les conséquences de ce déséquilibre, devenu structurel, se mesurent, d’ores et déjà, à l’aune de la spéculation effrénée qui prévaut tout à la fois dans les transactions sur les terrains encore disponibles, sur les coûts des matériaux de construction, la vente ou la location de locaux à usage commercial, administratif ou d’habitation. Avec un besoin en constante augmentation, au rythme de 8% l’an, le ciment produit par la Sococim (plus de 2 millions de tonnes l’an) et les Ciments du Sahel (environ 650 000 tonnes) ne suffit quasiment plus à la demande. Le produit est dans un vertigineux tourbillon inflationniste, malgré la rude concurrence entre les deux cimenteries. La tonne de ciment coûtait, cinq années plus tôt, 44 000 FCFA. Elle est actuellement cédée à 75 000 FCFA à Dakar (et encore plus cher quand on s’en éloigne, compte tenu du coût du transport). Le sable des plages, généralement utilisé dans les constructions, est de moins en moins accessible, du fait des mesures prises à l’encontre de son exploitation qui accentue l’avancée de la mer. Il coûte, en conséquence, de plus en plus cher. Il en est de même de presque tous les autres intrants qui sont, pour l’essentiel, importés.
La pression de la demande s’accentue sur un espace constructible qui se réduit comme peau de chagrin. Ainsi, des zones stratégiques ou à risques s’étendant sur plusieurs centaines d’hectares, dont le domaine public maritime, les réserves d’extension de la Foire de Dakar, les emprises de la Pyrotechnie, de la Voie de dégagement nord, du stade Léopold Sédar Senghor, du camp militaire de Thiaroye, du centre émetteur de Yeumbeul, du champ de tir de Ouakam et du camp militaire attenant à ce site, les servitudes aéronautiques autour de l’aéroport Léopold Sédar Senghor, le stade Assane Diouf ont été déclassés pour faire place à des lotissements immobiliers. Même des espaces inondables, comme la zone de captage des eaux de ruissellement entre l’autoroute et la route du Front de terre, ont subi un sort analogue.

Ils sont devenus si élevés qu’ils tendent à se rapprocher des standards occidentaux. Le loyer mensuel d’un appartement ou d’un ensemble de bureaux varie entre 1219 et 4574 euros au centre-ville.

Les yeux de la tête
La moindre parcelle de terrain coûte actuellement les yeux de la tête dans la capitale sénégalaise. Au centre-ville, le mètre carré de la plus vieille bâtisse à démolir pour du neuf ne vaut pas moins d’un demi million de FCFA. Dans la zone résidentielle des Almadies, le coût du mètre carré, qui était administrativement fixé à 9 euros, est maintenant à plus de 304 euros, si l’on en trouve encore. Dans les réserves foncières aménagées par l’Etat du Sénégal dans la proche et lointaine banlieue, en principe pour les ménages à revenus faibles ou moyens, les parcelles dont le prix officiel tournait autour de 15 euros le mètre carré se revendent, en ce moment, jusqu’à 152 euros. La surenchère sur les intrants de construction et sur les terrains, corrélée à des taux bancaires particulièrement élevés concernant l’immobilier (entre 8 et 14%) et à une demande toujours plus ample, a de déroutantes répercussions sur les loyers. Ils sont devenus si élevés qu’ils tendent à se rapprocher des standards occidentaux. Le loyer mensuel d’un appartement ou d’un ensemble de bureaux varie entre 1219 et 4574 euros au centre-ville. Dans les quartiers huppés de Sacrée Cœur Pyrotechnie, de Fann résidence, du Point E, des Almadies, des appartements et résidences de moyen ou grand standing sont loués entre 1000 et 3000 euros.

Coûts insupportables
Le coût élevé des loyers est d’autant moins supportable que les revenus de la plupart des Sénégalais sont bas. Le salaire moyen d’un cadre de l’administration publique tourne autour de 300 euros. Un ouvrier dans le secteur privé gagne à peine 152 euros et un agent de maîtrise 450 euros.
Force est de constater que le boum de l’immobilier, qui fait le bonheur des promoteurs, opérateurs financiers, entrepreneurs en bâtiment et pourvoyeurs d’intrants qui s’y activent, s’accompagne d’une insoutenable inflation qui met de plus en plus de Sénégalais dans l’impossibilité d’avoir un toit bien à eux, ou même d’en louer. Au train où vont les choses, une baisse des loyers, tant réclamée à Dakar, est d’autant moins possible que les sociétés d’Etat (Banque de l’habitat, Société nationale de l’habitat à loyer modéré, Société immobilière du Cap-Vert) censées réguler le marché en produisant des logements en faveur des faibles et moyens revenus ont, depuis longtemps, baissé les bras. Elles sont plutôt portées sur les réalisations haut de gamme. La législation en matière de bail immobilier est plus que désuète. Encore faut-il avoir la possibilité d’agir à la baisse sur les coûts en amont relatifs au foncier, au loyer de l’argent, au prix du ciment, entre autres, pour extraire Dakar de sa spirale inflationniste.

Les Afriques - Le Journal de la Finance Africaine


dimanche 25 janvier 2009

Un après-midi cino-resto

Fatou et Amina vont voir "The curious case of Benjamin Button" au cinéma

- Alors Fatou, comment as-tu trouvé le film ?
- Ben, on voyage, c'est original et fantaisiste, c'est un bon film, un bon choix Amina.
- C'était cool hein... Mais c'était surtout aussi la bonne vieille histoire d'amour... Maintenant allons djaffer (manger) !
- Hahaha là tu parles des vraies choses !
- C'est vrai, les gars veulent te faire croire qu'on peut vivre d'amour et d'eau fraîche, mais ton ventre te rappelle vite pour te dire "hein, j'ai faim". Et le film a quand même duré presque trois heures quoi...
- Amina, qu'est-ce qui nous arrive ? Notre génération ne sait pas rêver et nous sommes d'un cynisme... Je ne sais pas toi mais je choque souvent ma mère par exemple par certaines de mes réactions. Non c'est vrai, il y a les parents qui rêvaient et rêvent encore et il y a les petits frères qui croient qu'ils peuvent vivre des histoires extraordinaires. Entre les deux nous, nous pensons à manger ?!
- Ma chère, je ne sais pas pour les autres mais on est samedi après-midi et ce matin j'ai assisté à une réunion avec des collègues. Or si je suis fatiguée, j'ai faim ou les deux, je vais rêver mais crois-moi, cela ne sera pas les yeux ouverts !

Fatou et Amina sont dans un restaurant après le film.

- Alors Amina, ton projet se vend bien ?
- Tu sais moi, côté marketing et raconter tout et n'importe quoi juste pour vendre... C'est le problème avec cette fichue Génération X que nous constituons. Il y a des valeurs anciennes qui sont encore là en nous et qui ne matchent plus avec le monde moderne.
- Tu sais, j'ai une copine qui a à peu près le même projet à Toronto et ça marche plutôt bien.
- Non mais vous, c'est la Génération Y.
- C'est quoi la Génération Y ?
- C'est la Génération Facebook.
- Non, ça ce sont les amis de mon petit frère.
- Tu es née en quelle année encore ?
- 1978.
- Ah, tu es née vers la fin de la Génération X.
- C'est dingue hein, nous sommes là... un creux dans l'histoire humaine.
- Oui, les grands-parents ont fait la guerre, les parents ont vécu le Vietnam, les indépendances, la guerre froide, mai 68,... et les petits-frères vont tous vouloir être des Obama... Mais il faudrait quand même laisser un témoignage. Surtout nous qui sommes nés de parents de classe moyenne et qui sommes venus ici...
- Oh je ne sais, j'ai l'impression que nos vies ne sont pas suffisamment intéressantes à raconter...
- Ben, c'est vrai qu'il n'y a pas d'évènement majeur, pas de guerre, pas révolution...
- Et pour ce qui est de toi ou moi en particulier, nous ne sommes ni pauvres, ni à la rue, ni dans le luxe, nous ne nous saoulons pas puisque musulmanes...
- En effet... Puis il y a eu la guerre en Irak, mais il fallait continuer à payer le loyer, pas moyen de passer notre temps à manifester...
- Peut-être que nous aurions dû faire ça.
- Tu parles, nous sommes la génération aussi qui connait le Sida, alors nous allons pas nous jeter dehors comme ça en criant peace and love et prendre de l'herbe avec le premier inconnu !
Les deux rient à nouveau et la soirée se poursuit sur ce ton...

Pour des infos sur ce que c'est que la Génération X voir:
http://fr.wikipedia.org/wiki/G%C3%A9n%C3%A9ration_X

Et pour la Génération Y, voir:
http://fr.wikipedia.org/wiki/G%C3%A9n%C3%A9ration_Y


*

vendredi 23 janvier 2009

Que disait Geothe ?

Il disait entre autres: « Qui ne sait pas tirer les leçons de trois mille ans vit au jour le jour ».

Alors, de temps en temps, je me promène sur Wikipédia et j'y lis pas mal de choses intéressantes. J'aime particulièrement les définitions de termes utilisés en sciences humaines. Ce n'est peut-être pas exact comme dans un dictionnaire mais cela suffit pour se faire un idée plus précise du mot. En voici un que j'ai entendu aujourd'hui et qui m'ait resté dans la tête plus longtemps que lorsque je l'entends habituellement. Allez savoir pourquoi...

Démagogie - Définition sur Wikipédia

http://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9magogie


La démagogie (du grec demos « le peuple » et ago : « conduire ») est une notion politique et rhétorique désignant l'art de mener le peuple en s'attirant ses faveurs, notamment en utilisant un discours simpliste, occultant les nuances, utilisant son charisme et dénaturant la vérité.

Le discours du démagogue sort généralement du champ du rationnel pour s'adresser aux passions, aux frustrations de l'électeur. Il recourt en outre à la satisfaction des souhaits ou des attentes du public ciblé, sans recherche de l'intérêt général mais dans le but unique de s'attirer la sympathie et de gagner le soutien. L'argumentation démagogique est délibérément simple afin de pouvoir être comprise et reprise par le public auquel elle est adressée. Elle fait fréquemment appel à la facilité voire la paresse intellectuelle en proposant des analyses et des solutions qui semblent évidentes et immédiates.

Le terme « démagogie » aujourd'hui est largement perçu avec une connotation péjorative. En effet, l’étymologie du mot grec traduit plutôt le terme « démagogue » comme celui qui éduque, qui conduit le peuple.

La démagogie, même si elle est inhérente à toute démocratie, fausse le jeu d'une conception idéalisée de la démocratie produisant bien souvent des effets contraires à l’intérêt général.

Souvent confondue avec le terme populisme, la démagogie se différencie de celui-ci dans la mesure où elle renvoie à l'idée de "dire au peuple ce qu'il veut entendre" (d'où l'utilisation de termes simplistes), alors que le populisme renvoie à l'idée de "faire ce que le peuple souhaite".

« Verre Cassé » d’Alain Mabanckou


Je viens de finir de le lire. C'est... poignant. Un mélange inattendu entre la décrépitude et le merveilleux, une dualité très humaine qui finalement reflète la réalité intérieure de tous et de tout temps. J'ai trouvé ce livre magique.






Une critique du livre sur www.afrik.com

Portraits pittoresques des clients d’un bar congolais


Verre cassé ou les portraits pittoresques des clients d’un bar congolais. Alain Mabanckou livre dans ce cinquième roman l’histoire « très horrifique » du « Crédit a voyagé », un bar malfamé de Brazzaville. Verre Cassé, l’un des clients les plus assidus, s’est vu confié une mission très spéciale par le propriétaire. Il doit immortaliser dans un cahier les aventures fantastiques de la troupe « d’éclopés » qui fréquente son établissement.

Vendredi 4 août 2006, par Vitraulle Mboungou

Pour son cinquième roman, Verre cassé, l’auteur congolais Alain Mabanckou a choisi de placer une fois de plus les marginaux et autres damnés de la terre au cœur de son récit. Verre cassé est le nom d’un des clients les plus assidus du « Crédit a voyagé », un bar des plus atypiques de Brazzaville (Congo). Son propriétaire, l’Escargot entêté, soucieux de laisser une trace à la postérité et ayant remarqué le don de Verre cassé pour l’écriture, lui confie une mission très spéciale. Il doit inscrire dans un cahier l’histoire de la bande « d’éclopés » qui fréquente son bar pour que personne ne l’oublie. L’Escargot entêté pense que ses compatriotes n’ont pas « le sens de la conservation de la mémoire, que l’époque des histoires que racontait la grand-mère grabataire [est] finie, que l’heure [est] désormais à l’écrit parce que c’est ce qui reste, la parole c’est de la fumée noire, du pipi de chat sauvage ». Il déteste donc entendre les formules toutes faites du type, « en Afrique quand un vieillard meurt, c’est une bibliothèque qui brûle ». Lorsqu’il entend ce cliché, il répond : « ça dépend de quel vieillard, arrêtez donc vos conneries, je n’ai confiance qu’en ce qui est écrit [...] ».

L’art des références

L’une des grandes originalités de ce roman est ce clin d’oeil subtil fait à d’éminentes oeuvres littéraires, notamment africaines. Ainsi Alain Mabanckou écrit : « Je me souviendrai toujours de ma première traversée d’un pays d’Afrique, c’était la Guinée, j’étais l’enfant noir (Camara Laye, ndlr),[...] j’étais intrigué par la reptation d’un serpent mystique qui avalait un roseau que je croyais tenir réellement entre les mains, et très vite je retournais au pays natal (Césaire, ndlr), je goûtais aux fruits si doux de l’arbre à pain (Tchicaya U tam’si, ndlr), j’habitais dans une chambre de l’hôtel la vie et demie (Labou Tansi Sony, ndlr), qui n’existe plus de nos jours et où, chaque soir, entre jazz et vin de palme (Emmanuel Dongala, ndlr), mon père aurait exulté de joie, et je me réchauffais au feu des origines (Dongala, ndlr) ».

« La culture, c’est ce qui nous reste lorsqu’on n’est plus rien », aime à répéter Alain Mabanckou qui témoigne ainsi son estime à tous ces grands auteurs, véritables maîtres à penser pour lui. Poète et romancier, il s’est imposé, avec une quinzaine de livres, en quelques années comme l’un des écrivains les plus talentueux de la littérature francophone. Couronné par le prix Ouest-France/Etonnants Voyageurs, le prix des 5 continents de la Francophonie et le prix RFO du livre en 2005, Verre cassé se situe dans la lignée d’African Psycho , où le romancier congolais examinait déjà les sociétés africaines « dans leur vie quotidienne du dehors », sous l’angle de la rue, des marginaux ou des victimes du système familial.

Alain Mabanckou le conteur

Le roman se présente comme un long monologue de plus de 200 pages, à la fois celui de Verre Cassé, l’anti-héros par excellence, mais aussi celui des autres clients du bar. Alain Mabanckou ne respecte pas ici les règles d’écriture normale. L’ouvrage est dépourvu de tout signe de ponctuation, pas le moindre point à la ligne, juste des virgules. En livrant ainsi les histoires en continu, il donne un ton oral et rythmé à la narration. Il se fait conteur à travers Verre cassé qui chante tel les griots « les hauts faits » de chacun, afin qu’ils aient tous droit, même les plus démunis, à une trace dans l’histoire. C’est sans aucun doute une des grandes réussites de ce roman.

Alain Mabanckou, qui a obtenu le Grand Prix littéraire d’Afrique noire en 1999 avec Bleu Blanc Rouge, est parvenu à conserver, avec succès, dans ce dernier roman, le « langage parlé », en retranscrivant le débit (de boissons aussi) des clients du « Crédit a voyagé ». Ecrit dans un style léger et ludique, le dernier roman du professeur de littératures francophone et afro-américaine à l’Université de Californie Los Angeles (UCLA), est une réussite totale. Un vrai régal qui peut aussi s’apprécier en anglais, polonais, espagnol et coréen.

Verre Cassé d’Alain Mabanckou, paru aux éditions du Seuil en janvier 2005 et cette année en livre de poche.

mardi 20 janvier 2009

Le retour à la normale - Écrit le 5 novembre 2008

*
Il est une heure du matin passé. Je range dans un placard les journaux et magazines sur le président Barack Obama qui était éparpillés dans ma chambre. J'ai quatre ans pour finir de les lire. La tension est retombée, maintenant c'est la fête pour une grande partie du pays et ailleurs dans le monde. Je sors du tiroir le magazine Lire, l'édition de la rentrée littéraire. Les romans traitent de d'histoire d'hommes et de femmes et la dialectique de leur vie n'a pas beaucoup changé depuis... plusieurs décennies au moins. Je regarde ce que j'ai d'autres. Il y a un magazine qui montre en gros plan le visage de Soeur Emmanuelle, rayonnant d'une profonde fraternité. Elle nous a quitté il y a quelques jours. Le journal retrace la vingtaine d'années qu'elle a passé au milieu des "chiffonniers du Caire", au milieu des ordures et des cochons. Elle avait 62 ans quand elle a décidé de vivre la vie de ces frères et de ces sœurs, les plus démunis de la région du Nil. À l'âge de la retraite, elle s'est offerte une seconde vie, la plus heureuse selon elle, car elle y a fait l'expérience de l'infinie force des plus faibles.

Oui, après toute cette fièvre, Barack Obama est élu, l'Amérique et le monde passe une ère nouvelle, une ère "postraciale" dit-on partout. Mon ordinateur souligne ce dernier mot en rouge: le dictionnaire ne le connaît pas encore. J'aurai aimé ne pouvoir dire que ceci: je ne pense pas que l'humain soit un être supérieur dans l'univers. Bien au contraire, au vue de notre histoire, nous avons plusieurs fois tenu très haut le flambeau de la bêtise humaine et nous avons soufflé dessus à l'unisson, la faisant grandir à l'infini. Mais voyez-vous, il y a quelques heures, des dizaines de millions d'hommes et de femmes se sont levés pour mettre à la tête de la plus grande puissance de la planète un homme dont l'une des sœurs est native de l'Orient et qui, en parlant de son enfance, a dit: "Mon père ne ressemblait en rien aux gens qui m’entouraient, il était noir comme le goudron alors que ma mère était blanche comme le lait, mais cela me traversait à peine l’esprit." Certes, nous vivons une crise alimentaire doublée d'une crise financière qui évoluent en une crise économique mondiale. Les ventres sonnent de plus en plus creux. Mais jamais dans notre histoire notre monde ne s'est montré aussi digne aux yeux du reste de l'univers. Au bout de six mille ans, avons-nous finalement entamé une ère postraciale ? Je ne sais pas. Mais quitte à devoir me remettre d'une profonde déception, j'ose timidement l'espérer. Et au moment où j'écris ces lignes, je le pense, je le sens, je le vis, ne serait-ce que pour un jour, ne serait-ce que pour ce jour...

Mais ceci, ce n'est pas complètement moi. Une autre partie de moi qui a beaucoup lu pendant cette campagne sait qu'en ce qui intéresse les non citoyens américains comme moi, à savoir la politique extérieure, la différence entre un démocrate et un républicain ici se trouve dans la forme et non dans le fond. Certes en termes de race, une page est tournée, et nous évoluons dans un monde plus juste dans la lutte contre la discrimination, la ségrégation. Mais va-t-on évoluer vers un monde meilleur ? L'année prochaine, des soldats reviendront de l'Irak, mais le drapeau américain restera planté en Irak sur la carte géopolitique du bureau oval. Ce sera partir, sans partir... D'autres soldats iront en Afghanistan car la lutte contre le terrorisme est loin d'être terminé. Des bases américaines négocieront leur installation dans la plupart des pays d'Afrique, pour concurrencer la présence massive de la Chine sur ces terres encore riches malgré des siècles d'exploitation. Contrairement à un McCain, Obama négociera avant d'aller en guerre contre quiconque. Mais quand il faudra y aller, il ira... Et il faudra encore pour des dizaines de millions de gens sur cette planète de vivre et de mourir en laissant tous ces grands mots, paix, liberté, démocratie, fraternité, allaient certes de l'avant, mais avec une telle lenteur que seuls quelques éclats comme celui de ce soir, dispersés ici et là dans la marche du Temps, nous rappelle leur existence, à l'image des saisons qui nous rappelle que la Terre tourne autour du Soleil.

La civilisation est fragile et Obama parle d'espoir. Pas seulement pour les États-Unis d'Amérique. Il parle d'espoir pour le monde. Je fais parti du monde. Et il va falloir me convaincre. Il a quatre ans pour ça. En attendant, je vais lire quelques extraits du Prince de Machiavel, avant de dormir. La lucidité, même dans le sommeil. Pour survivre, en restant libre.

Une journée pas ordinaire - Écrit le 4 novembre 2008

*
Ce matin, je me suis levée comme tous les lundis matins, avec plus d'énergie que n'importe quel jour de la semaine grâce à la bonne nuit que j'arrive à m'offrir en me coucher tôt le dimanche soir. Le temps de me préparer, et vite j'ouvre mon laptop pour voir si ma mère m'a envoyé un e-mail. Avec le décalage horaire de huit heures avec l'Éthiopie, il y a de bonnes chances que oui. Effectivement, il y en a un, je lui répond rapidement. L'heure tourne vite, je n'aurai pas le temps de prendre mon petit déjeuner. Ce n'est pas bien grave, je le prendrai à la Banque. Je cours prendre mon bus, la 16L, à l'angle de Madison Lane et Blair Road. J'habite à Falls Church, dans l'État de Virginie. Le long du chemin, les pancartes rouge "Mc Cain 2008" plantés dans le gazon de certaines maisons défient les pancartes bleu "Obama 2008" de leurs voisins. Dans le bus de cette banlieue du Nord de la Virginie qui a reçu ces dernières décennies une importante immigration latino-américaine et asiatique, les gens se disent bonjour et discutent habituellement de leur quotidien, du dernier livre qu'ils sont entrain de lire, de leurs prochaines vacances... Mais aujourd'hui, le silence est pesant. Avez-vous déjà surveillé une classe d'examen ? Vous êtes assis en face des étudiants, à la table réservée pour le professeur, et vous passer trois à quatre heures de temps à les regarder se concentrer et se crisper. Chez certaines personnes, un peu trop ouvertes à la vie intérieure des autres, ces heures ne sont pas seulement longues mais lourdes aussi. Car ces surveillants aspirent comme une éponge tout le stress des étudiants. C'est exactement ce que je ressens dans le bus. Il y a de la tension, du stress, que je vis entièrement et malgré moi.

On arrive à la station de métro, le terminus du bus. La station est collée au bâtiment du Pentagon. Rien d'étonnant à ce que les comtés avoisinants (dont Fairfax, le comté de Falls Church) ait été pendant longtemps le bastion des républicains. La Virginie elle-même a toujours été un État républicain. Enfin, jusqu'à aujourd'hui. En sera-t-il de même demain ? Pour le moment, l'État est qualifié de "swing state". Les phares du métro de la ligne bleu se profilent dès que j'atteins le quai. Il y a énormément de monde, plus que d'habitude. Ou peut-être est-ce le pli sur ces fronts d'habitude détendus qui me donnent cette impression ? Il n'y a que quatre stations avant d'arriver à Farragut West. La Banque est à un bloc de là en sortant sur la 18ème. J'y arrive bien vite et me dirige directement à la cafétéria pour acheter un petit quelque chose en guise de petit déjeuner. Puis je monte dans mon bureau, m'assois et me branche sur le serveur du logiciel Sata. J'ai mal à la tête et je ne sais pas pourquoi. Je traîne ce mal de tête tout au long de la journée. À midi, à la cafétéria, la nouvelle station de repas "Africa", pour sa première apparition à la Banque, a une file deux fois plus longues que les autres. Elle se trouve au fond, sur ma gauche et la plupart des candidats aux bananes plantains sont Caucasiens. Juste en face, au "Grill" un chef fait griller des hamburgers. Je note que la file est composé de pas mal d'Africains et esquisse un sourire.

Vers 15h, je commence à ranger mes affaires. J'ai trop mal à la tête, il est temps que je rentre. Je décide de jeter un oeil sur la Maison Blanche à quelques dizaines de mètres de là. La devanture de la grille est en rénovation. La Maison fait peau neuve... pour se préparer au changement ? Dans le métro, le bruit des pages de journaux qu'on tourne et qu'on retourne s'amplifie. Bien sûr, le même sujet s'étale en gros titres sur chacun d'eux. Un me touche : "The Amazing Race", car il me fait penser à "Amazing Grace". Arrivée à la station "Pentagon", je cours pour ne pas rater mon bus. Puis, une fois au coin de Madison Lane et de Blair Road, je cours aussi, plus que je ne marche, pour arriver à la maison. Enfin chez soi. Ici, parmi mes colocataires, personne n'a le droit de vote aux États-Unis. Cela se sent. Quelques minutes plus tard, la tension commence à diminuer et le mal de tête s'estompe peu à peu. Maintenant, la question est la suivante: comment vais-je faire pour tenir demain au travail jusqu'à 17h ? Je vais commencer par faire des provisions dès maintenant en allant manger toute de suite. La journée de demain va être longue, très longue...

Sentiments

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En l'occasion de cette journée historique pour les États-Unis d'Amérique, je vais poster dans les deux billets qui vont suivre deux textes que j'ai écrits autour de l'élection présidentielle de l'année dernière (souvenirs...). Depuis que je suis revenue de Washington DC, beaucoup me demandent pourquoi je ne suis pas restée là-bas jusqu'à l'inauguration du nouveau président ou pourquoi je n'y retourne pas pour ça.

Vous vous souvenez du film Le Bon, la Brute et le Truand ? Si oui, vous vous souvenez alors de la célèbre réplique: "Tu vois, le monde se divise en deux : ceux qui ont un pistolet chargé et ceux qui creusent. Toi, tu creuses". Eh bien moi je dirai que le monde se divise en deux: il y a les acteurs de l'histoire et les spectateurs de l'histoire. Pour l'heure, quand je regarde ce que j'ai déjà accomplie, je suis sans conteste dans la catégorie spectatrice. Et malheureusement (car peut-être suis-je entrain sans le savoir de vraiment passer à côté de quelque chose de sérieusement exceptionnelle) ou heureusement (peut-être est-ce normal de par mon âge et de par mes origines de ne pas trouver exceptionnel qu'il existe aujourd'hui des Blancs suffisamment intelligents pour voter pour un Noir suffisamment intelligent à la tête de leur pays), toujours est-il qu'il m'indiffère d'être une spectatrice de près ou de loin... Alors je souhaite bonne chance aux acteurs et espère que la spectatrice que je suis aura un jour le courage (ça ce n'est pas facile), l'optimisme (ce qui est de plus en plus difficile vu qu'aujourd'hui on a besoin d' "audace" pour "espérer") et l'opportunité (car il faut être en vie au bon moment) de les rejoindre dans leurs justes combats.

lundi 12 janvier 2009

Potentiellement une source de crises politiques à venir‏



Les transferts de fonds des immigrés vers leur pays d'origine réduits par la récession


Yves Mamou - Le Monde du 05 Décembre 2008

La montée du chômage dans les pays développés due à la récession commence à avoir des conséquences indirectes sur les pays du Sud. Les travailleurs migrants, qui occupent souvent des postes non qualifiés, sont parmi les premiers à perdre leur emploi. Or une partie de leur salaire est transférée vers leur pays d'origine. Ainsi, en 2007, 190 millions de travailleurs migrants dans le monde ont fait parvenir à leur famille 318 milliards de dollars (environ 248 milliards d'euros), selon les statistiques de la Banque mondiale. Si l'on considère les seuls envois au Sud, ces transferts de fonds ont atteint 240 milliards de dollars. Entre 2000 et 2007, ces envois ont été multipliés par quatre. Mais depuis un an, la croissance s'est nettement ralentie et, en 2009, les transferts pourraient décliner. Un tiers d'entre eux ont concerné, en 2007, trois pays : l'Inde (27 milliards de dollars en 2005), la Chine (25,7 milliards) et le Mexique (25 milliards). Mais pour tous les pays du Sud, ces flux sont vitaux. La Banque mondiale estime qu'ils représentaient 17 % du produit intérieur brut (PIB) d'Haïti au début des années 2000 et 40 % du PIB somalien à la fin des années 1990. Les études de la Banque mondiale ont montré que l'argent des immigrés a contribué à réduire la misère. En Ouganda, la part de la population qui vivait en dessous du seuil de pauvreté s'est réduite de 11 % en 2005. Même si l'Afrique ne réceptionne qu'une part minime - 4 % seulement - de l'ensemble des fonds migrants, une réduction sensible de ces sommes commence à inquiéter la Banque africaine de développement (BAD). Celle-ci estime que les 15 milliards de dollars attendus en 2008 (14 milliards en 2007) pourraient faire défaut. D'ores et déjà, le Mbuzi ya Jamii (littéralement "une chèvre pour la famille"), qui permettait aux Kényans immigrés de payer en ligne des produits et services destinés à la famille restée au pays, a vu son chiffre d'affaires décliner, relève un rapport de la BAD. Les transferts de fonds à destination de l'Amérique latine et des Caraïbes se sont élevés à près de 60 milliards de dollars au cours de 2007. Soit une hausse à un chiffre entre 2006 et 2007 (6 %), alors qu'entre 2000 et 2006 la hausse a été de 19 % par an. La crise de l'immobilier aux Etats-Unis a fait grimper le chômage des Hispaniques à 8,8 % en octobre. Bien au-dessus de la moyenne nationale à 6,5 %. La Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes estime que, en 2009, 2 à 3 millions de migrants pourraient être contraints de rentrer au pays. La crise pourrait toutefois révéler une flexibilité nouvelle du marché du travail européen. Les 250 000 Polonais installés en Irlande depuis les années 2000 sont les premiers touchés par les licenciements. Mais les aides qui se déversent sur l'ensemble des pays d'Europe centrale pour les aider à passer le cap de la crise ont incité plus de 20 000 salariés polonais à rentrer au pays. Ce qui dégonfle les statistiques du chômage en Irlande et fait grimper celles de l'emploi en Europe centrale. Les violentes émeutes qui ont éclaté en Chine dans la province du Guangdong, fin novembre, après que des centaines d'ouvriers ont été licenciés par des fabricants de jouets, pourraient être un signe avant-coureur du climat à venir dans d'autres pays victimes de la chute des transferts d'argent. La bande côtière de la Chine importe massivement des travailleurs non qualifiés en provenance de l'immense arrière-pays. Selon Benoit Vermander, directeur de l'Institut Ricci de Taipei à Taïwan, "près de 150 millions de paysans chinois ont quitté leurs champs au cours de ces dernières années pour trouver un emploi dans le bâtiment, les usines de montage, etc.". Jusqu'à il y a peu, "ce nombre augmentait sans cesse", explique M. Vermander. Mais la mécanique s'est arrêtée. Officiellement, les statistiques du chômage indiquent une hausse légère de 3 % à 4 %. Mais elles ne couvrent que les Chinois munis d'une autorisation. Les "clandestins" se comptent, eux, par millions. Quant aux conséquences financières pour l'arrière-pays, elles sont difficiles à quantifier. "Les transferts ont lieu en liquide quand la personne retourne au pays. Mais cet argent a un rôle vital, il a permis de bâtir des maisons neuves, financer l'accès aux soins, des achats de bétail, l'école pour les enfants." Une manne qui est en train de subitement disparaître.

jeudi 8 janvier 2009

Quand la musique n'était pas danse

Chronique sur la musique dans la tradition sénégalaise. Je la trouve superbe !

http://www.seneweb.com/news/chroniqueagn.php?artid=20386


Quand la musique n'était pas danse

Entendons-nous: danse, je veux dire au sens ludique et frivole du terme. A titre d’exemples, le dandinement majestueux du « ndawrabin », rituel d’exhortation lebou n’a rien de commun avec les déhanchements lascifs, voire érotiques du « arwatam » laobe ou « ndaga » saloum saloum.

Les civilisations de l’écriture ont, par rapport à celles de l’oralité, l’avantage de références historiques vérifiables et sur la trame desquelles se tissent indéfiniment l’évolution d’une société.

Chez les détenteurs de ce legs, tout musicien contemporain sachant lire le solfège est en mesure de faire revivre des périodes antérieures aux technologies d’enregistrement.

D’où la difficulté pour l’Africain sans héritage ou tradition scripturale d’attester de l’authenticité des musiques datant de plus d’un siècle. Que jouait-on, en telle ou telle circonstance, sous Samory, Béhanzin, Lat Dior ou Alboury et avec quels instruments ? Les ethnomusicologues se perdent en conjectures…

Au Sénégal, les premières archives sonores authentifiables remontent seulement à 1946, date d’implantation de Radio Dakar sous l’ancienne AOF (Afrique Occidentale Française).

Dans notre paysage urbain, l’on semble davantage incommodé par la pollution des déchets organiques que par la pollution sonore autrement plus nocive. Lieux de promenade, marchés, transports publics sont envahis de décibels agressifs. A ces nuisances s’ajoute le terrorisme des chaines FM dont la plupart des animateurs rivalisent dans indigence d’idées comme de culture musicale pour nous faire oublier ou ignorer des éléments significatifs de notre culture.

Il en est ainsi des Kasak aux circoncis, rituels d’initiation rythmés de tam-tam auxquels tout mâle ayant une bonne voix et connaissant le répertoire des chants de circonstance pouvait prendre part. Nombre de vocalistes contemporains furent découverts à l’occasion des séances de Kasak. On peut citer Assane Ndiaye l’ancien, Feu Laye Mboup, Thione Seck et même Youssou Ndour.

Avant sa sortie de «la case des hommes» le circoncis devait mémoriser et réciter sous le fouet du Selbe-initiateur les paroles d’exhortation inculquées durant les séances qui ne se déroulaient que de nuit.

Une autre épreuve, celle là réservée aux femmes, est le tatouage, encore pratiqué, de la gencive et/ou des lèvres chez les femmes de plusieurs ethnies du Sénégal mais de moins en moins chez les wolofs plus perméables à l’occidentalisation.

L’écrivain sénégalais Ken Bugul rappelle dans son roman Riwan que « le tatouage consolidait les gencives et donnait des dents éclatantes. »

Renouvelable comme soin cosmétique, le tatouage marquait initiatiquement la puberté d’une jeune fille. L’opération consiste à pigmenter, au moyen de kaolin et d’épines provenant du sump-jujubier la surface à tatouer. Les épines garrottées ensembles sont appelées fagot.

Les griottes exhortent les vertus de la « patiente » en chantant ses louanges tout en frappant de la paume ou du bout des doigts une calebasse renversée sur une bassine remplie d’eau. Le fagot qui s’émousse est aussitôt remplacé par une toute fraîche. La fille est jugée sur le nombre de fagots reçus sans crier ni même tressaillir. Les hommes, quoiqu’absents du rituel n’en étaient pas moins présents, virtuellement s’entend car leur parviendra la rumeur concernant celle qui s’est comportée avec ou sans courage dans l’épreuve, aune d’éligibilité au mariage.

Au fil du temps, les épines seront remplacées par des aiguilles à coudre (une vingtaine environ) garrottées ensemble. Suite à de nombreux cas d’infection, voire de tétanos, depuis l’usage du métal, le tatouage ne fait plus recette.

N’oublions pas le « Ndëpp » cérémonie d’exorcisme, survivance des pratiques païennes du Sénégal d’avant l’Islam mais encore pratiquée. Il est intéressant de noter que chants et musique non seulement exorcisent le malade mais envoûtent et mettent en transe une ou plusieurs spectatrices jusqu’alors considérées normales. On dit alors que la musique a interprété, incidemment, le «bákk » ou hymne appartenant à la lignée familiale de l’envoûtée. Le Ndëpp pratiqué, sous le terme vaudou dans les Caraïbes, au Brésil est généralement organisé par des femmes. Serait-ce là une survivance misogyne universelle faisant de la femme une sociétaire du démon ? Voire !

Il est important de souligner qu’au Sénégal coexistent deux types de rituels: les traditionnels aux connotations plus ou moins religieuses comme le taaja bóon sorte de mardi-gras, la veille du nouvel an musulman et les survivances païennes dont le baaw naan aux dieux des eaux pourvoyeurs d’abondance.

Autrefois, pour secourir la victime d’une piqure de serpent venimeux le tam-tam envoyait le message à « ceux qui savent »…

Ku jaan matt

Sam xel dem ci dee

Ba ngay dund’ ak

Ba ngay dee lépp

Sam xel dem ci dee

“Mordu par une vipère

Tu ne songes qu’à la mort.”

Le guérisseur psalmodie des paroles ésotériques au terme desquelles, la victime déjà comateuse ouvre les yeux et de sa plaie dégouline le venin du reptile. Instituteur de brousse, j’en ai été témoin, avec une méfiance dubitative dont j’ai encore honte.

On peut signaler également chez les Wolofs, le simb – jeu du faux-lion. Un solide gaillard de musculature imposante et grimé aux couleurs ocres du fauve danse au son d’une batterie de percussions en poussant des hurlements effrayants; puis, se lance à la poursuite des spectateurs…Il traîne au milieu de l’enceinte sa « proie » qu’il feint de lacérer. Intervient alors le jatkat-dompteur qui débite des litanies au terme desquelles le « lion » lâche sa victime et rampe de soumission au pied du dompteur. Le spectacle riche en couleurs est ponctué de chants et danses par les femmes de l’assistance. Que reste-t-il du simb ? Une grotesque et déplorable parodie télévisuelle pour touristes

Une histoire que me raconta mon père illustre parfaitement les temps ou la musique n’était pas danse. Les jeunes hommes en âge de prendre femme se livraient, une fois l’an, au "joŋante" joute orale sous l’arbitrage de l’historien généalogiste du village. Chaque concurrent, flanqué du musicien de son choix appuyant et ponctuant ses propos, défilait devant un parterre de filles nubiles. L’un déclinait son ascendance aristocratique, un autre vantait la richesse de sa famille ou ses greniers de mil jamais désemplis, etc. Mon père rappela que le sien était le plus grand éleveur de chevaux du patelin, tout en faisant danser au rythme de son joueur de tama (tambour d’aisselle) le plus bel animal du haras paternel finement harnaché avec, sur le dos, une selle incrustée d’argent. Il fut parmi les élus à désigner au généalogiste la jeune femme sur laquelle il avait jeté son dévolu. Père, sans la moindre hésitation, après avoir retiré la selle incrustée d’argent, offrit le cheval à son batteur. Il arriva à la maison plein d’appréhension pour le don irréfléchi de l’animal préféré de son géniteur qui lui cria: fils indigne! Comment as-tu eu l’indécence d’offrir un cheval sans ses apparats? Retournes y ajouter la selle.

Ces quelques exemples illustrent bien que le but ultime de la musique était moins réjouissance que système d’ancrage dans les us et coutumes.

Et si l’on réécoutait la musique ?

Aujourd’hui, la musique ne s’écoute plus; elle se danse, faute de paroliers suffisamment imprégnés de leur culture ou ne maitrisant aucune forme d’écriture et dont la voix constitue le seul atout.

Amadou Gueye Ngom

Critique social