vendredi 27 mars 2009

L'économie et le politique ne font toujours pas bon ménage...

Je suis optimiste quant à l'issue de cette crise (car enfin, c'est connu, après la pluie le beau temps, c'est une question de cycle...), mais je suis pessimiste quant à sa durée. Bien que nous ayons compris les leçons prises de la crise de 29, nous n'en sommes seulement qu'à notre seconde grande crise (en terme d'ampleur et de généralisation à l'échelle de la planète). Du coup, ça balbutie encore. Mais est-ce parce que nous ne savons vraiment pas quoi faire, ou est-ce parce que nous le savons mais nous n'avons pas les outils pour le faire, ou encore est-ce parce que nous le savons, nous avons les outils pour le faire, mais nos gouvernements ont peur ne pas se faire réélire ? Jacques Attali pense que cette dernière option fait parti intégrante du problème. Horizon politique de court terme versus horizon économique de long terme: toujours le même dilemme !


Le geste et la parole

Par Jacques Attali, publié le 20/03/2009 10:15 - mis à jour le 20/03/2009 10:23

Les gouvernements, confrontés aux mêmes problèmes que les entreprises, n'agissent pas aussi vite. Alors, ils parlent.

Pour survivre, les nations, comme les entreprises, devront bouleverser leurs organisations. Les entreprises le savent mieux que les nations, car elles ont conscience de leur précarité ; elles se posent sans cesse, même si elles ne le nomment pas ainsi, la question de savoir si leur "modèle d'affaire" (le célèbre business model défini d'abord par les universités anglo-saxonnes) est encore valide; c'est-à-dire si elles peuvent continuer à produire et à vendre de façon équilibrée.

Or, aujourd'hui, même si beaucoup continuent d'espérer que tout va vite revenir au monde ancien, elles commencent à réaliser, dans de nombreux secteurs (et d'abord les premiers touchés : les banques, la distribution, l'automobile, le transport aérien), que leur « modèle d'affaire » ne tient plus : les clients ne sont plus là pour acheter ; les banques ne sont plus là pour prêter. Et cela exige des bouleversements durables.

D'abord des bouleversements quantitatifs : pour survivre pendant plusieurs années avec des recettes beaucoup plus basses, elles devront réduire leurs dépenses d'investissements, leurs stocks, leurs gammes de produits ; elles devront allonger les délais de paiement de leurs fournisseurs ; elles devront transformer une part aussi grande que possible de leurs coûts fixes en coûts variables. Autrement dit, généraliser la précarité, aggravant la crise.

Ensuite des bouleversements qualitatifs : les consommateurs vont chercher à consommer de plus en plus malin : l'ostentation n'est plus de mise et nous entrons durablement dans une économie de soldes, dans laquelle chaque entreprise aura le plus grand mal à maintenir la spécificité des marques, face aux produits génériques.

Les gouvernements, confrontés aux mêmes problèmes, n'agissent pas aussi vite. Parce qu'ils n'ont pas les mêmes exigences de survie; parce qu'ils sont parfois plus menacés par les électeurs en agissant qu'en n'agissant pas; parce qu'ils croient avoir le temps; parce qu'ils sont pris dans des mécanismes de décision très complexes et des lobbys contradictoires.

Alors, faute d'agir, ils parlent: ils annoncent d'énormes plans de relance, qu'ils ont un mal fou à financer. Alors que la première priorité est l'accroissement des fonds propres des banques, l'amélioration de la trésorerie des entreprises, l'augmentation de la demande et la réduction des dettes, donc des déficits, rien de sérieux ne se passe, dans aucun pays.

A l'inverse, les banques centrales ne parlent pas, en raison de la rigidité de leurs doctrines et de l'unicité de leurs objectifs, mais elles agissent : elles fournissent des sommes immenses à l'économie, permettant même, au mépris de toute orthodoxie, aux entreprises d'obtenir de l'argent en direct en échange de papier commercial, en utilisant pour cela des noms aussi discrets et obscurs que possible (le dernier qualificatif apparu dans les communiqués des gouverneurs de banque centrale étant quantitative easing, soit "facilitation quantitative", ce qu'on devrait plutôt traduire par "planche à billets").

Mais cela ne pourra suffire : une entreprise ne pourra survivre par le seul jeu de ses réformes internes ni par le seul recours au papier monnaie : elle ne pourra en effet mettre en dépôt à la banque centrale du papier de ses clients si elle n'en a pas. Si le marché, une fois de plus, se révèle plus rapide et plus adaptable que la démocratie, on ira droit vers l'hyperinflation (au-delà de 20 %), forme extrême de la déloyauté, qui fera disparaître les dettes, au détriment des prêteurs. Déjà, bien des entreprises s'y préparent. Bien des démocraties y sombreront.

J@attali.com

mercredi 25 mars 2009

La démocratie... une illusion ? - Suite

Voici un article de "bakchich.info" qui a été repris par le site internet "seneweb.com" et qu'apprécient beaucoup les internautes sénégalais qui scandent depuis dimanche "Bravo à tout le peuple sénégalais !"

http://www.bakchich.info/Dakar-impitoyable-pour-la-famille,07180.html

Dakar impitoyable pour la famille Wade

Mercredi 25 mars 2009, par Xavier Monnier

Pour ses 9 ans à la tête du pays, Gorgui Wade a reçu une soufflante assez inattendue aux dernières élections, programmées pour lancer son fils Karim en politique. Et un violent bizutage, un !

Un vent frais balaie Dakar en cette fin de dimanche après midi. Et malgré un soleil resplendissant, les Sénégalais ont sorti leur petit pull. Et mis une grosse veste au régime de l’Alternance du président Wade. Après neuf ans de règne, le Sopi (changement en wolof) connaît sa première défaite électorale avec les élections locales du 22 mars. Quasi pile neuf ans après l’historique victoire du 19 mars 2000. Joyeux anniversaire Gorgui [1] !

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Abdoulaye "Gorgui" Wade
© Kerleroux

La route a pourtant été bien déblayée. Entre la mainmise de l’Anoci, dirigée par l’héritier du président Karim Wade, les « défenestrages » successifs des Premiers ministres (successeurs potentiels passés dans l’opposition), l’usure des chefs de l’opposition aussi marqués par leur appartenance aux quarante années de règne socialiste que leurs 9 ans de purgatoire, rien ne semblait pouvoir gêner le pouvoir. Sauf ces farfadets de Sénégalais, « des gorgorlu » ces électeurs. « T’as qu’à voir en banlieue (de Dakar), se marre le truculent opposant Ali Aidar, ils ont pris l’argent du pouvoir pour faire la claque lors des meetings et sont allés voter dans le sens contraire ». Les farceurs…

Giflée à Saint-Louis (sept ministres battu), fessée à Fatick (l’ancien PM Macky Sall vainqueur), submergée à Thiès malgré la retape de Karim (son frère ennemi Idrissa Seck l’a emporté), la coalition Sopi 2009 a eu ce qu’elle voulait… le changement.

Bien plus qu’un symbole. Certes, le pouvoir pourra gloser sur un scrutin qui n’a rassemblé « que » 51% de votants (35% à 16 heures), selon les dernières estimations. Certes, l’opposition ne maîtrise pas le pays – le redécoupage électoral l’a pris de court et ses listes ont été déposées dans deux fois moins de localités que le pouvoir. Mais comment gouverner sans être maître des grandes villes du pays ? Seule Ziguinchor, capitale de l’instable Casamance, a été gagnée.

Sanction familiale

Et surtout, la famille Wade s’est retrouvée humiliée à Dakar. Père, mère et fils battus dans leurs propres bureaux de vote au Point E, quartier fort coquet de la capitale ; elle aussi tombée dans l’escarcelle de Benno Siggil Sénégal (S’unir pour un Sénégal debout), la coalition de l’opposition.

« En descendant dans l’arène, Wade a transformé le scrutin en référendum contre lui. Et il a largement perdu, entraînant son fils dans la chute ». Tout juste sorti de la table du Régal, Jupiter Tamsir Ndiaye, l’un des plus célèbres chroniqueurs du pays, répond au téléphone pour livrer son édito. En direct. Et en stéreo pour les habitués qui ont allumé la radio dans le restaurant.

Chez Jamal comme ailleurs, les résultats ont surpris. Journalistes, avocats, opposants ou proches du pouvoir réunis en ces murs rivalisent d’adjectifs. « Naufrage », « désastre »… répétés à l’envi. Lundi, ils couvriront les unes des journaux. Qui n’avaient rien vu venir.

Comme en 2007. Quand la réélection de Wade au premier tour de la présidentielle avait abasourdi milieux diplomatiques, médiatiques et économiques. « Imprenable », glissait Madiambal Diagne, le patron du Quotidien, à l’idée d’une victoire de l’opposition à Dakar « Mêmes les gens qui ont agité des foulards, qui sait pour qui ils voteront au final ». « Inéluctable », comme la victoire de Karim à Dakar, y compris dans ces colonnes.

« Même là où les gens ne savaient pas qui se présentait contre Wade, relance Jupiter, revenu terminer son steak, ils ont voté pour l’opposition, le rejet est clair ».

Et la chute d’autant plus vertigineuse dans le camp présidentiel, un peu aphone depuis l’annonce des premiers résultats.

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Karim Wade
© Kerleroux

Texto à 8h32 pour annoncer le vote de Karim, relance à 18 heures pour enjoindre à écouter les résultats. Mais même avec un wolof balbutiant, les infos sont claires. Et Benno Siggil Sénégal, bureau de vote par bureau de vote, écrase le Sopi.

Hassan Ba, Cheikh Diallo, Racine Talla… Injoignables. Les soutiers de la Génération du concret, le mouvement de Karim Wade, restent muets en soirée électorales Messageries, répondeur, sonnerie dans le vide. Téléphone en dérangement pour Karim. Un mutisme logique, tout juste troublé par une inquiétante annonce. « L’ARTP (l’agence de régulation des télécommunications et des postes) a demandé aux groupes privés de couper leurs émissions dès minuit ». Autant dire de jeter un voile sur le vote.

Depuis 2000, les journalistes, qui annoncent en direct et du bureau de vote à chaque élection, constituent un excellent pare-feu à un magouillage des résultats. Et à cette heure-là, Dakar n’est pas encore tombée… L’ambiance monte. « Ils ne vont pas faire ça, passer en force, déjà ils ont prolongé l’heure de vote à Dakar ». « Le vieux est capable de tout, rappelle-toi, il avait viré tous les exécutifs régionaux ». « Mais les gars, ça va se voir là, non ? ». Ouf de soulagement à 22h30, le gouvernement a demandé à l’ARTP de retirer son ordre. Nouvelles tournées. Bière, gi tonic, coup de fil.

Karim Wade : GC mais j’y arrive pas

Rires à table à l’annonce du message : « Le pays est tombé, glisse dans un souffle un responsable de la Génération du Concret, le mouvement de Karim Wade. nous sommes devant à Dakar mais c’est serré ». Énième signe de la confiance - « arrogance » - qui a habité la GC tout au long de la campagne et s’est avérée particulièrement communicative. Nul ne pensait Dakar prenable. Ni l’opposition, ni bien sûr et en premier chef, Karim Wade et les Concrétistes, le surnom des membres de la Génération du Concret. Qui, vendredi 20 mars déjà, voyaient bien plus loin que la mairie.

« Mieux vaut que Karim ne parle pas au meeting de son père », phosphorait à deux jours du scrutin, Hassan Ba, conseiller présidentiel et filiale. Echappé du siège de l’Anoci où il reçoit, le conseiller présidentiel et filiale, responsable « mobilisation » de la GC sirote son Coca. Un peu pressé dans ce restaurant huppé du plateau, nom africain mais pas un plat du continent. « Imagine, que son nom soit plus scandé que celui du président lors du meeting de clôture, les cadres du PDS risquent de mal le vivre. Mieux vaut qu’il ne s’y rende même pas et qu’il ménage Pape Diop [2] . » Finalement, Karim ménagera les susceptibilités. Pas de discours mais un petit défilé, main dans la main, avec Pape Diop… Son père, lui, aura enjoint les vieux leaders de l’opposition à prendre leur retraite, un peu plus tôt, pour ce meeting de cloture de la campagne. Et d’expliquer que les manifestations de brassards rouge étaient l’œuvre de ses propres partisans qui voulaient l’alerter… Raté.

Sorti de son interview à la RFM et après un détour à la mosquée, Wade junior se réfugie… au Fuji. Un restaurant japonais, en plein Dakar. Racine Talla ne tarit pas. « Il avait ça en lui depuis tellement d’années », s’extasie le vieux militant. Mine approbatrice du président de l’Anoci. Plan sur l’avenir. 2012 ? « Oui, la présidentielle évidemment qu’on travaille pour cela, il faudra structure la Génération du concret ». Une GC alors appelée à dépoussiérer le Parti démocratique Sénégalais, où ne « restent plus que des notables, sans base politique, des rentiers du régime ». Bref, place aux jeunes. A l’abordage les jeunes Turcs… Même les brassards rouges aperçus le long de ses périples ne l’inquiètent pas outre mesure. « Je suis conscient des problèmes, mais cela ne veut pas dire qu’ils sont contre le président, ou moi. Et puis l’opposition n’existe pas ». Sans doute l’aveuglante lumière du pouvoir. Pas encore vraiment dissipée.

« Nous avons perdu Dakar, mais si nous n’étions pas descendus sur le terrain pour sauver les meubles, cela aurait été un désastre », se persuadent les membres de la GC, convaincus « que le PDS et les vieux barons ont perdu leurs troupes ». Une nuit des longs couteaux qui s’annonce…

Reste à écouter la prochaine allocution du président, prévue pour vendredi, jour officiel de proclamation des résultats. Avant le scrutin, volontiers hâbleur et bravache Gorgui Wade avait assuré qu’il tiendrait compte du message envoyé par les Sénégalais après le scrutin.

En attendant, sur les plateaux télé, radio, et au Régal, les scenarii possibles s’égrènent joyeusement. Au milieu des volutes de fumée, des commandes, des sonneries, des verres qui trinquent. Gouvernement d’union nationale, législatives anticipées, entrée de Karim au gouvernement… Et peu de mots sur Benno Siggil Sénégal, ou Khalifa Sall, qui menait la liste victorieuse à Dakar. « Il faudra quand même que l’opposition se renouvelle, c’est la chance de Khalifa. Il faudra seulement que les vieux l’acceptent ». Pas gagné.

Des plans sur la comète teintée d’un brin d’inquiétude. A minuit, des bureaux sont encore annoncés ouverts. Un dernier frisson avant l’évidence. Le Sénégal a voté, le pouvoir n’a pas triché, l’opposition a gagné. En Afrique, un improbable tiercé…

lundi 23 mars 2009

La démocratie... une illusion ?

Ça y est, les sénégalais ont exprimé ce dimanche aux très attendues élections locales qu'ils étaient très mécontents du bilan de la Coalition Sopi du Président Wade, parti politique qui incorpore en son sein la section de la Génération du Concret du fils du président, Karim Wade.

L'opposition émerge sur la scène politique, pour la première fois aussi clairement depuis 9 ans. La démocratie a tranché dans ce grand petit pays d'Afrique et ce n'était pas gagné d'avance: lisez vous-mêmes cet article écrit juste avant l'issue de l'élection. Comment le Sénégal va tenir d'ici les prochaines élections présidentielles en 2012 ? Affaire à suivre de près !

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A Dakar, Karim Wade rêve tout haut de succéder à son père
LE MONDE | 23.03.09 | 14h42

Le Sénégal, longtemps considéré comme un phare de la démocratie en Afrique, va-t-il s'ajouter à la liste des pays du continent où les fils succèdent à leur président de père ? Doté de moyens financiers considérables, Karim Wade, 40 ans, fils du président sénégalais Abdoulaye Wade, 82 ans, est aussi bardé d'une solide confiance en lui-même : "Je suis un gagnant. Je suis quelqu'un qui n'a jamais perdu dans la vie", lance-t-il dans un entretien publié dans le quotidien L'Observateur, samedi 21 mars, à la veille des élections locales où il briguait la mairie de Dakar.

Longtemps discret sur ses ambitions politiques, Karim Wade y "annonce (s)a candidature à faire du Sénégal un pays émergent", relançant les rumeurs sur une élection présidentielle anticipant l'échéance de 2012. "Je connais de grandes démocraties (...) où le fils a succédé au père", réplique-t-il à une question sur le risque de monarchie. "Nos standards, ce n'est pas la sous-région, ajoute-t-il avec condescendance, c'est Dubaï, Singapour, Hongkong", alors que le Sénégal vit au rythme des coupures d'électricité et des mouvements sociaux.

GESTION INCERTAINE


Soucieux d'apaiser les tensions à la veille des élections locales, le président Wade a d'ailleurs gracié 19 émeutiers de Kédougou (sud-est). Ces jeunes chômeurs avaient été condamnés à des peines de 5 à 10 années de prison pour avoir participé à des manifestations.

Formé en Europe aux métiers de la finance, Karim Wade, lui, a présidé aux grands travaux lancés à l'occasion du sommet de l'Organisation de la conférence islamique organisée voici un an dans la capitale sénégalaise. Le "sommet" fut un échec et son opacité financière jamais levée. La gestion de l'Etat sénégalais apparaît si incertaine que la France a dû consentir à la fin 2008 un prêt de 125 millions d'euros, équivalant à une année d'aide publique au développement.

Les résultats des élections de dimanche diront si les jets de pierres et les foulards rouges - signes de contestation - agités lors des tournées électorales des Wade père et fils reflètent un véritable mécontentement populaire. Et si l'opposition, qui était sortie laminée de la présidentielle de 2007, est en mesure de se refaire une santé. "Le Sénégal n'appartient ni à Abdoulaye Wade ni à Moustapha Niass mais aux Sénégalais eux-mêmes", a déclaré M. Niass, l'un des chefs de l'opposition dimanche. "Pour moi, il n'y a pas de défaite possible", lui avait répondu à l'avance le fils du président.

Philippe Bernard

vendredi 20 mars 2009

Le gouvernement de G.W, Bush interventionniste ?

Oui, et même très interventionniste, selon cette étude de l'Institut Économique de Montréal:

Le Point sur l'explosion des dépenses du gouvernement fédéral américain

par Michel Kelly-Gagnon

On entend souvent dire que la présidence du républicain George W. Bush fut caractérisée par une réduction de la taille de l'État et qu’il s’agit d’un exemple classique « d’échec du laissez-faire ». Pourtant, un simple examen des dépenses du gouvernement fédéral américain pendant les huit ans de l'administration Bush montre clairement qu'il s'agit d'un mythe grossier et totalement non conforme à la réalité.

La suite sur:

http://www.iedm.org/uploaded/pdf/point0309.pdf


Donc ce gouvernement républicain avait des dépenses notamment non militaires extrêmement élevées, bien avant le sauvetage qu'il a effectué à l'arrivée de la crise. Pourtant, personnellement je n'entendais pas de grincement de dents là-dessus à l'époque... Intéressant !

jeudi 19 mars 2009

Le FMI abaisse de nouveau ses prévisions pour 2009

Hum... J'espère que cela se limitera à 2009. Seul problème, une fois qu'on entre en contraction, il sera très difficile de prévoir à quel moment on en sortira.

Cet échec de notre système est dû à la limite de nos instruments économiques pour en réduire au minimum les défaillances. Où va-t-on maintenant ? On croise les doigts ?

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AFP -
Le Fonds monétaire international a une nouvelle fois abaissé jeudi ses prévisions pour l'économie mondiale et prévoit désormais que le produit intérieur brut de la planète devrait enregistrer cette année sa première contraction depuis la seconde guerre mondiale.

Moins de deux mois après la publication de ses précédentes prévisions, le FMI a indiqué qu'il tablait désormais sur une contraction du PIB mondial comprise entre 0,5% et 1%.

Les économies développées devraient connaître une "profonde récession", avec un recul de 3,0% à 3,5% de leur PIB.

Aux Etats-Unis, cette contraction serait de 2,6%, et au Japon de 5,8%. Ces deux pays courent "un risque élevé" de déflation, selon le FMI. En zone euro, ce risque est "modéré", mais le PIB perdrait 3,2%.

Dans les pays émergents et en développement, la prévision de croissance a été également abaissée, et cette croissance ne serait plus que de 1,5% à 2,5%.

Ces prévisions sont contenues dans une note que le FMI a rédigé pour préparer la réunion des ministres des Finances du G20, le week-end dernier à Londres.

Le Fonds a estimé que les Etats n'en ont pas fait assez face à cette récession. Il a calculé qu'au sein du G20, son objectif de consacrer l'équivalent de 2% du PIB à des plans de relance n'avait pas encore été atteint.

"Les réponses nationales à la crise mondiale en sont à leurs débuts. (...) Des mesures sont toujours nécessaires pour rétablir la stabilité financière", a affirmé l'institution multilatérale.

mercredi 18 mars 2009

Une superbe interview d'Ékoué

Ekoué de « La Rumeur » : l'enfant du pays
10/02/2008

Où en êtes-vous avec votre procès ?

Ça fait bientôt cinq ans que ça dure, c’est un procès en diffamation envers la police nationale, suite à un article que Hamé a écrit dans le cadre de notre magazine « La Rumeur Record ». il y mettait en perspective les bavures et les crimes policiers impunis. Trois passages de l’article ont été attaqués, l’affaire s’est retrouvée en correctionnelle, nous avons gagné. Elle s'est ensuite retrouvée en appel, nous avons encore gagné. C'est la cour de cassation qui a cassé les deux relaxes. La cours a considéré que le devoir de mémoire n’excusait pas tout, tu peux parler et écrire sur les crimes policiers, mais pas jusqu’à la diffamation, tel en à été le point de vue de la cours de cassation, qui renvoie l’affaire au 18 mars prochain. Ce sera le dernier round, au tribunal de Versailles, chez Louis IX quoi, on n’est donc pas sûr de gagner. Voilà où on en est.

C’est Sarkozy qui a porté plainte contre votre groupe, que penses-tu de sa politique ?

Sa politique est à l’image de sa personne, je pense qu’il est certainement le président de la cinquième république le plus profondément inculte, je pense qu’il ne maîtrise pas les fondamentaux de la politique institutionnelle et de la diplomatie.

Tu continues dans la diffamation là ?

Oui, je le dis et je le maintiens, c’est ce que je pense, si maintenant je n’ai plus le droit de donner mon avis ! C’est quelqu’un qui est vraiment dans la réaction constante, tu sens qu’il n’y a pas vraiment de discours construit, il a certes des analyses pertinentes, il réagit au gré de l’agenda médiatique avec plus ou moins de talent, c’est un bon orateur. Mais un bon orateur ne fait pas nécessairement un bon président de la république. Je suis convaincu que c’est un type qui souffre vraiment d’une certaine culture, on se souvient de son discours à Dakar par exemple, « au temps béni des colonies », un discours où il s’adresse à des étudiants, à des personnes diplômées, qui ont des connaissances théoriques, certainement égales si ce n’est plus importantes que les siennes, et en fait, on avait le sentiment de se retrouver 40 ans en arrière.

Libération avait fait une couv. avec comme titre Le Président Bling Bling, ta réaction ?

Ils n’ont pas forcément tort, la Rolex au poignet, le top model un peu retapé mais top model quand même, le yatch, le Fouquet’s, il ne manque plus que la grosse voiture, j’ai l’impression d’être dans un clip de Jay Z.

Justement sans faire de transition, que penses-tu de tout l’engouement qu’il y a autour de son fils aîné producteur de rap ?

Je m’en prends profondément à la politique du père, maintenant si son fils a envie d’écouter du hip hop personne ne doit le lui interdire, ceci dit, personnellement, je ne ferais pas du son avec le fils de Le Pen, maintenant, Sarkozy a baigné dans la culture hip hop, qu’il la respecte et qu’il en fasse avec passion, je ne vais pas lui interdire de faire de la musique.

Et s'il vient te voir ?

Je ne pense pas que l’occasion se présentera mais compte tenu des rapports qu’on a avec son père, j’aurai un peu de mal quand même, beaucoup de mal, pour te parler franchement. J’ai connu des fils de grands patrons, des gens très bien, pourtant leurs pères étaient responsables de la déforestation en Afrique, donc à travers le fils, je ne peux pas faire le procès du père, ce serait trop lâche. Des mecs qui font des sons, y’en a plein les immeubles qui sont au moins aussi talentueux que lui si ce n’est plus, après, je n’ai jamais écouté ce qu’il fait. Mais la démarche opportuniste qui consisterait a faire du son avec le fils de Sarko parce que c’est le fils du président, je trouve que ça pue. Le hip hop à ce niveau efface les barrières raciales, sociales c’est en ça que ce mouvement est intéressent et c’est pour ça que je n’ai aucun jugement de valeur à avoir, je ne suis pas du tout dans cette logique.

Un fils d’immigré, rappeur de surcroît qui rentre à Science Pô, ce n’est pas courant ?

Aujourd’hui, bizarrement, y’a pas mal de personnes issues de la diversité comme ils aiment le dire qui sont rentrées dans les grandes écoles, encore une fois le discours n’est pas relayé. Faut pas se mentir, Sciences Pô, l'ENA, Math Sup, 99%, des étudiants sortent du 16ème, ont des papas instituteurs, avocats, et ont finalement peu de mérite. Ils ont grandi avec un tel champs de références, que lorsqu’ils passent des concours, ils ont autant de facilité que moi d’écrire un 16 et de le rapper dans une mixtape, elle est là la véritable discrimination. Il y a une énergie dans les cités qu’il faut investir, ça partait d’une bonne démarche d’intégrer des étudiants des ZEP, ça représente peu mais bon, je salue la démarche. En ce qui me concerne, je suis rentré en cinquième année par la voie la plus difficile. Pour y être admis, tu passes par une évaluation écrite, ensuite par un entretien soumis a un premier jury, puis un deuxième jury de l’école doctorale et seulement après tu rentres, nous sommes onze par classe.

Qu’est-ce qui t'a décidé de rentrer à Science Pô ?

Sincèrement, mon challenge est d’aller dans les endroits où nous ne sommes pas représentés. J’aime être dans des créneaux désertés, comme faire du rap un peu politisé, mais parce qu’il y a aussi une revanche sociale, une revanche tout court, tout ça est motivé par la haine.

On l’entend bien dans vos lyrics, vises-tu une carrière politique ?

Ça vaut pour une école comme l'ENA, ce sont les affaires publiques, l’administration, les hauts fonctionnaires, plusieurs grands patrons ont fait Sciences Pô, des artistes également comme Léo Ferrer. Évidemment que Science Pô est un moulin à élites, c’est ce qui forme les politiques de ce pays. Mais moi, faire de la politique institutionnelle, adhérer à un partie, porter une cravate, sortir des discours convenus, jamais de la vie.

Tu veux donc faire partie de l’élite de ce pays ?

Non, justement c’est tout le contraire, je considère que dans ce type d’écoles, on te donne des armes, on te soumet des références que tu n’as pas dans les éléments de masse. Tu y apprends des choses qui te sont démontrées par des catégories de sociologues, de politologues, des lectures finalement assez fermées. Moi, je veux des armes parce qu’il faut savoir qu’on nous fait la guerre dans ce pays, faut pas avoir une vision angélique de la France, je ne suis pas Abdel Malik. Je ne vais pas te sortir que « oui j’adore le drapeau français, que j’aime ses valeurs, que j’aime ses littératures », très bien.

Une part est très inquiétante, notamment dans son rapport aux minorités, dans cette espèce de mécanisme vraiment imprégnée dans le système, de ce racisme structurel. Quand tu es noir, issu de milieu moyen ou modeste, tu as 90% de chance de foncer dans le mur. Pourquoi des jeunes ne deviendraient-ils pas journalistes ou écrivains ? Pourquoi n'auraient-ils accès qu'à des jobs d’intérim, aux universités ou aux lycées poubelles ? C’est parce que tout ça est structurel, ce n’est pas le fruit du hasard, c’est parce que tu as une organisation, qui est du ressort et des volontés politiques, rien est fait par hasard, le hasard c’est quand tu t’en tiens à des explications passives.

Quels sont tes objectifs alors en dehors du fait de te constituer des armes ?

Je vais te répondre franchement, j’ai en tête quelque chose, mais ce n’est pas encore définif, je ne préfère pas en parler mais j’ai envie de démontrer. Tu sais tu as des profils d’intellectuels issus de la culture hip hop, c’est valorisé aux Etats Unis mais pas en France, parce qu’en France le rap a été colonisé au même titre qu’ils ont colonisé les Antilles, les Caraïbes ou l’Afrique avec des acteurs comme la radio Skyrock. On est partis d’une culture de revendications métissées à aujourd’hui du Diam’s, et j’en passe qui n’ont que comme point commun d’être français de souche et blanc de surcroît, donc ça m’inquiète. Moi, je revendique un héritage métisse, je ne suis pas du tout séparatiste, je ne suis pas communautariste loin de moi cette idée, mais aujourd’hui j’ai l’impression qu’on tombe dans un communautariste mais dans un autre sens.
Ma volonté première est de m’en sortir économiquement, et heureusement qu’il ne se repose pas sur les play listes de Skyrock, non au contraire, je sais là où il y a de l’argent et ce qu’il faut faire pour en avoir. On veut cantonner le ghetto: tu auras un disque d’or, tu passeras sur Skyrock, tu auras une voiture, une maison, tu auras une vie sociale assurée, alors que c’est faux, tous les exemples un par un démontrent que de toute façon, ce sont des pétards mouillés qui durent dix ans maximum et qui après retournent dans leur cité, et ça c’est inquiétant.

Tu dis que vous ne faites pas du rap français, mais du rap d’immigrés, qu’est ce que tu entends par là, vous êtes tout de même français.

Je ne suis pas dans cet état d’esprit qui consiste à me dire qu’on ne veut pas de moi, mais je suis français à tout prix, non. Moi j’essaie de me construire un statut avec ce que j’ai. Le statut qui correspond le mieux à ma personnalité, à mes jugements, à ce que je suis, c’est celui de fils d’immigrés né en France. Il y a une histoire derrière l’immigration, les gens s’imaginent que l’immigration c’est des gens qui se sont téléportés d’Afrique en France, non, il y a de la douleur, de l’exil, des humiliations, le fait d’habiter dans des endroits de relégation sociale, de ne fournir une immigration malgré une société française profondément raciste, donc moi c’est ça mon héritage, mon histoire de France elle commence là.

J’en ai rien à foutre de Louis XIV, de la Renaissance ou du Cercle des Lumières, ça m’intéresse comme je peux lire un roman, et oui c’est aussi un pied de nez à montrer le rap français, qu’est ce que ça veut dire ? C’est le rap bleu blanc rouge, c’est Sinik, Fatal Bazouka, c’est ça le rap français, non, je ne suis pas d’accord, je préfère faire du rap de fils d’immigrés.

Alors La Rumeur est un groupe de rappeurs philosophes, ou un groupe de futurs hommes politiques ?

C’est un groupe de mecs qui a grandi dans la culture hip hop et qui en est venu aux études. Si je n’avais pas connu le rap, je serais en train de cavaler avec des kilos de shit, et l’histoire serait réglée, donc le rap tel que je l’ai pratiqué m’a réconcilié avec le savoir. Ensuite la question est, qu’est ce tu crées comme alternative pour être viable, pour continuer à faire de la musique ? Et bien c’est de faire des tournées, de faire des ateliers d’écriture, c’est d’aller à la recherche de son public, et puis surtout se former, parce qu’on a été contraint et forcé. Quand tu te fais attaquer par le Président de la République, ancien Ministre, que tu leur dis que tu es un rappeur et fier de l’être mais qu’en plus tu es passé par les mêmes écoles, la donne change.
J’ai donc un double regard, j’ai mon vécu et j’ai aussi des connaissances qui me permettent d’être légitime dans le débat et ne pas être disqualifié de faits ou considéré comme le banlieusard type à qui on va parler de Zidane et qui va en plus être content.

En tant que togolais, que penses-tu de la politique de ton pays ?

Je pourrais en parler des heures du Togo. C’est simple, la politique togolaise, c’est le résultat de 30 ans de politique française après l’indépendance. J’ai rôdé une rhétorique, quand on se demande pourquoi les immigrés viennent en France, l’immigration de masse c’est un produit du pillage éhonté de nos pays, mais ce n’est évidemment pas dit dans les médias. Comment t’expliques qu’aujourd’hui la proportion d’immigrés d’Afrique du nord et d’Afrique sud saharienne, est plus nombreuse que celle des italiens, ou des portugais ? Parce que nos pays ne sont pas souverains, la souveraineté de nos états a été bradée, ils ont mis à la tête de nos pays, des flics. L’administration française ne s’arrête pas de Lille à Perpignan, elle continue de Lomé à Cotonou à Abidjan... Eyadema, Bongo, Wade, sont des préfets pour moi, tout est géré comme des préfectures. Compare le discours de Sarkozy au Congrès Américain à celui qu’il a tenu à Dakar, tu conclueras que nos pays ne sont souverains ni politiquement, ni économiquement, ce sont des dictatures financées et armées par le pouvoir français, parce que les intérêts économiques sont à la mesure de leurs enjeux de croissance et autre, c’est pour cela que l’appellation fils d’immigré veut dire quelque chose. Pour prendre en exemple Eyadema, c'était un agent zélé de l’administration française pendant la guerre d’Algérie, qui a combattu aux côtés des français et qui s’est retrouvé président par un coup d’état appuyé par l’Elysée et par le Quai d’Orsay dans un pays qu’il a ruiné économiquement, où il a liquidé les opposants. Le Togo aujourd’hui est plongé dans la misère la plus noire alors que paradoxalement il a une diaspora extrêmement brillante avec un certain nombre d’intellectuels. Que ferait la France sans ses colonies ? C’est la question qu’il faut se poser, moi la colonisation, je n’en parle pas au passé, on est encore dans un contexte de colonisation, on n’en est pas sorti.

dimanche 8 mars 2009

Powerpoint du 8 mars 2009

À chaque journée internationale de la femme, je reçois un document powerpoint qui circule sur le net et dans lequel on me souhaite "Bonne fête". Ce dimanche matin j'ai reçu ceci:

***
Les femmes sont comme les pommes dans les arbres...
Les meilleures sont à la cime de l'arbre.
Les hommes ne veulent pas attraper les meilleures parce qu'ils ont peur de tomber et de se blesser...
Et donc, ils prennent les pommes pourries tombées à terre qui bien qu'elles ne soient pas si bonnes sont faciles à ramasser.
Alors, les pommes qui sont au sommet de l'arbre, pensent que quelque chose est mauvais
avec elles, quand en réalité,
"Elles sont excellentes".
Simplement elles doivent être patientes et attendre que l'homme convenable arrive ...lequel sera
suffisamment courageux pour monter jusqu'au sommet de l'arbre pour elles.

Nous ne tombons pas pour être ramassées, celui qui a besoin de nous et nous veut fera TOUT pour
nous atteindre...
Avec affection pour mes amies pommes !
Tu es unique dans ce monde et comme telle... tu mérites le respect et souviens toi...

La femme est sortie de la côte de l'homme, non des pieds pour être piétinée, ni de la tête pour être supérieure...
...mais du côté pour être égale, sous le bras pour être protégée, et à côté du coeur pour être aimée...
Seulement cela, être aimée...
Envoie ça à des femmes de qualité !!

***

Évidemment, moi je lis ça et... Bon disons le carrément. Pourquoi elles attendent d'être pourries ces pommes pour tomber ? C'est quoi cette passivité ? Hey, il faut prendre son courage à deux mains et descendre toute seule malgré le vertige et sans avoir à être pourrie. Oui, il faut descendre toute seule, et même qu'ensuite c'est pas fini, il faut chercher et creuser dans les broussailles pour trouver une autre moitié qui pourrait nous compléter. Et c'est pas gagné, un vrai bazar en bas, y grouille tout et n'importe quoi. Par contre une fois que l'autre nous a vu, qu'on a fait un petit bout ensemble, et qu'on lui a montré à quel point il nous est facile de nous promener sur un arbre, on se permet parfois de menacer de remonter dans l'arbre et de le laisser se débrouiller tout seul, en bas, avec les autres grouillants et il sait bien que ce n'est pas facile de trouver dans le fouillis grotesque des broussailles l'échelle qui lui permettra de nous retrouver là-haut. Donc il fait attention et comprend qu'on ne serai jamais à prendre pour acquise. Puis, de notre côté aussi, nous faisons attention parce qu'on n'a pas tellement envie de remonter dans l'arbre. Lui ne le sait pas mais le soleil tape fort là-haut, et on est quand même pas si mal en bas, sous les feuillages...

Bonne fête à toutes les femmes !

vendredi 6 mars 2009

Tant que les lions n'auront pas leurs propres historiens...

J'avais été déçue de voir que l'éditeur de "Noir Canada: pillage, corruption et criminalité en Afrique" faisait face à des poursuites abusives. Ces petites maisons d'édition qui luttent pour donner une autre version de l'histoire - celle écrite par les plus faibles - se font souvent écraser par les puissants de ce monde. Mais ça bouge, et au Québec on se mobilise...

Le Devoir

Le projet de loi contre les SLAPP revivra

Alexandre Shields

Édition du vendredi 06 mars 2009

Plusieurs organismes demandent à la ministre de la Justice d'agir rapidement

Le projet de loi pour contrer les poursuites-bâillons, mort au feuilleton l'automne dernier, devrait être de retour dans le menu législatif de l'Assemblée nationale au cours des prochaines semaines, a confirmé hier au Devoir une source au ministère de la Justice. De quoi réjouir les organisations qui luttent contre les SLAPP, notamment les Éditions Écosociété, qui viennent d'essuyer un nouveau revers devant les tribunaux.

Bien consciente que les travaux étaient «très, très avancés» avant le déclenchement des élections provinciales, la nouvelle ministre de la Justice, Kathleen Weil, entend donc reprendre là où on avait laissé. Cela devrait se faire «très rapidement», a-t-on indiqué hier à Québec. D'ailleurs, a-t-on rappelé, les quatre partis politiques présents à l'Assemblée nationale sont favorables à l'adoption d'un tel projet de loi.

Le projet de loi 99, «loi modifiant le Code de procédure civile pour prévenir l'utilisation abusive des tribunaux et favoriser le respect de la liberté d'expression et la participation des citoyens aux débats publics», avait franchi presque toutes les étapes devant mener à son adoption. Or le déclenchement des élections provinciales a fait en sorte qu'il est mort au feuilleton.

Le retour de ce dernier dans les priorités gouvernementales devrait soulager quelque peu les organisations qui militent contre ces poursuites, qualifiées d'abusives par plusieurs. Des dizaines d'entre eux s'étaient d'ailleurs donné rendez-vous hier devant le Palais de justice de Montréal, invitant la ministre Weil à agir promptement dans ce dossier.

«Nous demandons que le gouvernement mette sur pied un fonds d'aide aux victimes dans le but de favoriser l'accès à la justice, et souhaitons qu'un mécanisme de révision de la loi soit mis en place afin de s'assurer de son efficacité dans quelques années», a aussi plaidé une porte-parole de la Ligue des droits et libertés, Lucie Lemonde.

«Nous espérons également que Mme Weil respecte l'engagement de l'ancien ministre de la Justice et fasse en sorte que cette loi s'applique aux causes actuellement devant les tribunaux», a pour sa part demandé Guy Cheyney, des Éditions Écosociété. Il faut dire que le petit éditeur fait lui-même face à deux poursuites relatives à la publication du livre Noir Canada: pillage, corruption et criminalité en Afrique. La multinationale Barrick Gold lui réclame pas moins de six millions de dollars, jugeant que l'ouvrage publié l'an dernier est diffamatoire. Le procès n'a toujours pas commencé.

Une autre société aurifère, Banro, poursuit l'entreprise québécoise pour cinq millions de dollars devant les tribunaux ontariens. Écosociété vient d'ailleurs de voir sa requête pour le rapatriement de la poursuite au Québec être rejetée par une cour ontarienne. Selon ce qu'a indiqué hier l'un des auteurs de l'ouvrage, Alain Deneault, cette décision sera portée en appel.

«On nous poursuit pour cinq millions de dollars en Ontario alors qu'il n'y a que 83 exemplaires du livre qui ont été distribués et pas nécessairement vendus. Ça fait quelque 60 000 $ de dommages par exemplaire. On frise l'absurde et c'est pour cette raison qu'on conteste la décision d'un tribunal ontarien d'entendre la cause», a expliqué M. Deneault.

Le couple Serge Galipeau et Christine Landry estime lui aussi faire l'objet d'une poursuite-bâillon, de 1,2 million $, pour avoir dénoncé l'émanation de gaz toxiques provenant du dépotoir Dépôt de matériaux secs, de Cantley en Outaouais. En plus des sommes importantes engagées pour faire face à la poursuite, M. Galipeau constate que «la grande majorité des gens qui demeurent autour du dépotoir ont cessé de se plaindre, malgré le fait que des gaz continuent de s'échapper de l'endroit».

Si le Québec va de l'avant, il deviendra la seule province canadienne à disposer d'une loi pour contrer les poursuites-bâillons.

***

Avec La Presse canadienne


mercredi 4 mars 2009

"Entre les murs"

J'ai beaucoup apprécié ce film. Y passent toutes les incompréhensions des sociétés de notre ère et de la manière la plus fluide et sincère possible - ce qui a satisfait mon goût pour le naturalisme. Selon les origines, un mot peu avoir plusieurs significations et ce qui est valable pour la langage verbal l'est aussi pour le langage non verbal. Le manque ou la mauvaise communication entre les êtres: il s'agit là d'un des plus grands fléaux des sociétés humaines et merci à Mr Cantet de l'avoir souligné d'une aussi belle façon.


De l'écrit à l'écran

par Baptiste Liger
Lire, septembre 2008

Entre les murs de Laurent Cantet
Et si on évoquait tous les problèmes du monde rien qu'en observant, pendant une an-née scolaire, la vie quotidienne d'une classe de quatrième d'un collège du XXe arrondissement de Paris? Le projet peut sembler présomptueux et, pourtant, Entre les murs le réussit haut la main. Le cinéaste Laurent Cantet s'est en effet emparé du roman éponyme de François Bégaudeau, qui joue ici avec malice son «propre» rôle de jeune professeur de français. Entre fiction et documentaire, le film sonne étonnamment juste - peut-être plus que le livre, parfois un poil trop théorique. Sans jamais tomber dans la démonstration ou le politiquement correct, la Palme d'or 2008 dépasse le seul constat social pour imposer une réflexion brillante sur le langage et la communication. On n'oubliera pas de sitôt les scènes dites des «pétasses» ou du «scolairement limité». Formidable.